Les origines de Guingamp

Les origines de Guingamp

PERSONNAGES AYANT JOUE UN RÔLE DANS L’HISTOIRE LOCALE, RÉGIONALE ET NATIONALE
DE 1034 A LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

Par M. Jean-Paul ROLLAND
Tableaux généalogique simplifiés par M. J.-P. COLIVET
– Période XIe-XIIIe siècle : clic ici
– Période XIIIe-XVIe siècle : clic ici

Les origines de Guingamp sont obscures, les premiers temps de son histoire se confondent dans l’histoire générale de la Bretagne. Ce n’est qu’au Moyen-Âge que les documents deviennent assez précis pour mettre en relief la vie particulière de la ville.

Je vais tenter de jalonner par différents personnages le déroulement de l’histoire de notre cité. Ces hommes et ces femmes qui ont eu le destin de nos ancêtres entre leurs mains, se mariaient ou s’alliaient, uniquement entre eux, pour défendre leurs intérêts ou agrandir leurs fiefs afin de mieux asseoir leurs pouvoirs sur le peuple.

Les seigneurs d’Avaugour, édifient vers 1034, une première fortification défendue par un rempart en terre surélevé d’une palissade en bois. C’est la première motte féodale érigée sur un promontoire dans une boucle du Trieux afin de contrôler le passage humain qui s’établissait à gué. Le Trieux, encaissé depuis sa source à Kerpert, s’étalait dans la prairie de Traouzac’h. En fait il y avait plusieurs gués qui se disent, en breton « roudouriou » et qui a donné aujourd’hui roudourou (nom du stade de football de l’équipe première de Guingamp).

En 1093, Etienne 1er de Penthièvre devient comte de Guingamp par son mariage avec Havoise de Blois dite de Guingamp ou du Goëllo.
Etienne 1er : né vers 1055, fils cadet d’Éon (ou Eudes) Ier de Penthièvre (1035-1079) et Enoguen ou Agnès de Cornouaille. Il meurt en 1136.
• Havoise de Blois : est fille putative (présumée) de Thibaut III de Blois et de sa seconde épouse d’Adèle de Vermandois.
L’union du Goëllo et du Penthièvre créa un fief puissant dont Guingamp fut la capitale.
C’est à partir d’Etienne qu’apparaissent les plus anciennes monnaies fabriquées à Guingamp, car Guingamp battait monnaie ! L’atelier monétaire établi dans la ville fonctionna, avec beaucoup d’activité et pour ainsi dire sans interruption, depuis la fin du XIe siècle jusqu’à la première moitié du XIVe siècle.

Denier Billon Atelier de Guingamp : + STEPhAN COM Croix pattée cantonnée d’une étoile aux 1 et 2. Le A est barré. Tête à droite, cinq points dans le col. La croisette initiale est dans l’axe vertical du profil. Le premier G est pointé et le A est barré.

Etienne fonda l’Abbaye de Sainte Croix (en 1134) pour les chanoines réguliers. Un de ses fils, Alain le Noir de Penthièvre, comte de Richemont (terres données à son frère Alain le Roux vers 1071, par Guillaume le Conquérant dans le Nord-Ouest du Yorkshire en Angleterre en remerciement de l’aide apportée lors de la conquête de l’Angleterre), épousa Berthe de Cornouaille, fille de Conan III, Duc de Bretagne (de 1112 à 1148) et Mathilde d’Angleterre. Il fonda l’Abbaye cistercienne de Coatmallouen (en 1142).

Ils eurent une fille, Constance de Penthièvre qui épousa, en autre, Alain III, vicomte de Rohan avec qui elle fondera l’Abbaye de Bon Repos en 1184.

Les descendants de Constance de Penthièvre furent Jean III, duc de Bretagne, son frère Guy de Penthièvre et leur demi-frère, Jean de Montfort.

Le troisième fils d’Etienne, Henri II, comte de Tréguier et Guingamp (1110-1183), n’assume aucune responsabilité avant son mariage en 1151 lorsqu’il obtient dans le partage du patrimoine paternel le Trégor avec Guingamp et également le Goëlo. C’est à cette époque qu’il installe dans l’abbaye Sainte-Croix de Guingamp l’une de ses concubines et des prostituées… Il chassa les religieux de leur monastère de Sainte-Croix, dont il fit un couvent de filles, qu’il soumit à l’abbaye de Saint-Georges de Rennes. Le scandale est tel qu’il nécessite l’intervention du pape Eugène III et de Jean de Chatillon ou de la Grille premier abbé devenu évêque de Saint-Malo. Henri se repent de sa conduite honteuse et rend l’abbaye à son abbé légitime, Moyse.

Les Moines rentrèrent en la possession de leur couvent, que leurs successeurs conservèrent toujours, jusqu’en 1763 ; il fut supprimé et érigé en paroisse, sous le titre de Prieuré. M. l’Abbé de la Frelonnière en est le seigneur.

Henri II, comte de Tréguier et Guingamp épouse à Mayenne, le 19 septembre 1151, Mathilde, fille de Jean Ier comte de Vendôme. Ils eurent pour descendance, Jeanne d’Avaugour (1300-1327), qui se maria en 1318 à Guy de Penthièvre (1287-1331), frère du duc Jean III.

Ils eurent pour fille Jeanne de Penthièvre dite la Boiteuse (1324-11384), mariée à Charles de Blois, neveu de Philippe VI de Valois, roi de France. Lorsque Jean III mourut en 1341, l’héritage fut indécis entre la fille de son frère Guy et son demi-frère Jean.

 Ce fut l’origine de la guerre de succession de Bretagne.

Jean II de Montfort fut fait prisonnier tout au début des hostilités. Sa femme, Jeanne de Flandre dite la Flamme (1295-1374), prit le commandement du Duché avec une énergie peu commune contre Charles de Blois, animé lui-même par l’ardeur de sa femme, Jeanne la Boiteuse. Ce fut la guerre des deux Jeanne.

En 1343, Édouard III (1312-1377), roi d’Angleterre pénètre dans Guingamp par la poterne des anglais après un siège très court. C’est le début de la guerre de Cent ans.

Quelque temps après c’est Philippe VI, roi de France (1328-1350), qui vient lui-même à Guingamp prendre la tête des armées opposées au parti Montfort.

Charles de Blois

En 1362, Charles de Blois confiait à Du Guesclin le haut commandement de son armée. Celui-ci vint à Guingamp en 1364. Il délivra la région des pillards anglais cantonnés aux châteaux qui leur avaient été attribués par Jean de Monfort car leur propriétaire avait choisi le camp de Charles de Blois, son rival :

  • Château de Pestivien (Bulat) habité par Roger David.
  • Château de Trogoff (Plouégat-Moisan) tenu par le capitaine Thomelin.

Charles de Blois ayant été tué à la bataille d’Auray le dimanche 29 septembre 1364 fut béatifié en 1904 par le pape Pie X, du fait de sa piété sans faille et ses neuf années d’emprisonnement à Londres. Du Guesclin fut fait prisonnier. Le fils de Jean de Montfort fut proclamé duc de Bretagne sous le nom de Jean IV.

A la mort de Jeanne la Boiteuse, Jean IV voulut s’approprier l’héritage. Les enfants de Charles de Blois confièrent leur défense à Olivier V de Clisson (1336-1407) qui se révolte contre le duc Jean IV.

En 1380, Jeanne de Penthièvre nomme Colin David (une rue de Guingamp dans le quartier de la Madeleine porte son nom), représentant de la communauté de Guingamp. C’est la première organisation municipale de Bretagne, créée 40 ans avant celle de Rennes.

En effet, en 1369, la guerre se ralluma entre la France et l’Angleterre. Jean IV signa maladroitement un traité d’alliance avec les Anglais. Le roi de France, Charles V, envoya contre la Bretagne une armée menée par Du Guesclin. Le traité Anglo-Breton fut rendu public. Jean IV, abandonné de tous, s’enfuit Outre-Manche en 1375. Du Guesclin gouverna alors la Bretagne au nom du roi de France !

En 1378, Charles V, roi de France, pensa que le temps de l’annexion définitive était venu. Il décréta la confiscation du duché en janvier 1379. Ce fut une erreur et une très mauvaise évaluation du sentiment national breton. Tous les bretons se soulevèrent contre la prétention française. Ils pressèrent Jean IV de revenir. Cet épisode est chanté par Alan Stivell dans An Alarc’h : le cygne de la chanson assiste au retour de Jean IV du haut de la tour d’Arvor le 3 août 1379 à Dinard. (Clic ici pour écouter la chanson d’Alan Stivell An alarc’h, le cygne de Montfort).

Du Guesclin ne voulant pas se battre contre un peuple uni (le sien) partit guerroyer au centre de la France. Il mourut, un an après, à Châteauneuf de Randon (Lozère). Charles V mourut en 1380 ; son successeur, Charles VI signa le second traité de Guérande avec Jean IV en 1381.

Ce dernier fit reprendre Guingamp, au duc, le 27 septembre 1387, par Rolland III Coëtmen (du Penthièvre) vicomte du château de Tonquédec.

Jean IV eut trois fils :

  • Richard, dont la petite fille fut Anne de Bretagne ;
  • Arthur, connétable de Richemont ;
  • Jean V.
Pierre II

A la mort de son frère François Ier de Bretagne, Pierre II devint duc de Bretagne sous le nom de Pierre II dit le Simple. Il s’opposa fermement aux prétentions françaises, non pas militairement mais par argumentations juridiques. Il formalisa l’invention de l’institution des « Neuf anciennes baronnies de Bretagne » censées faire le pendant aux neuf évêchés de Bretagne. Lors des États de 1451 il est donc ainsi procédé à la création de trois nouvelles baronnies en faveur de :

  • Jean de Derval le 19 mai,
  • Jean IV Raguenel, baron de Malestroit le 22 mai,
  • Tristan du Perrier, baron de Quintin le 23 mai.

Il mourut, sans postérité, en 1457.

Mère Françoise en habit de religieuse ainsi que la couronne et le camail d’hermine signifiant son rang de duchesse de Bretagne

Françoise d’Amboise (1427-1485), épouse de Pierre II : à la mort de son mari, sa famille songe à la remarier, mais elle souhaite se faire religieuse. Sa famille s’oppose; Elle, malgré certaines menaces, reste déterminée. Avant la mort de Pierre II, elle avait installé un couvent de Clarisses à Nantes mais ne put l’intégrer suite à une santé fragile.

Françoise d’Amboise, fonda le premier carmel féminin de France à Vannes, dans le quartier du Bondon, grâce au prieur général des Carmes : Jean Soreth. En 1463, ce couvent sera nommé les « Trois Marie » (Marie, mère de Jésus, Marie Salomé et Marie Jacobé).

En 1468, elle entre dans son monastère et l’année suivante elle fait sa profession de de foi ; elle est élue prieure de sa communauté de Vannes.

Elle fait appel au dominicain Alain de la Roche, qui établit la dévotion du Rosaire.

Elle meurt au couvent des Couëts (Nantes) de la peste contractée en soignant les malades le 4 novembre 1485.

Elle a été béatifiée quelques années après sa mort par le pape Innocent VIII.

François II (1435-1488), cousin de Pierre, lui succéda. Il s’opposa au roi de France (Charles VII) par de multiples actes, en particulier son titre : « duc par la volonté de Dieu », le port de la couronne fermée, symbole de la souveraineté… Il froissa les seigneurs bretons en s’entourant de  conseillers bretons (le chancelier Guillaume Chauvin et ambassadeur régulier à la cour du roi Louis XI, le trésorier général Pierre Landais) qu’il laisse gouverner et se déchirer… Ces conseillers étaient des vassaux (ou courtisans) du roi de France qui cherchaient à obtenir une charge ou maroquin (fonction ministérielle).

Sceau de François II

Les bretons commandés par le vicomte Jean II de Rohan (1452-1516) assiégèrent Nantes ; il était marié à Marie de Bretagne, fille du duc François Ier de Bretagne. Il commença la construction du château de Pontivy et fit bâtir le pont habité de Landerneau. Il s’opposa souvent au duc François II. Les guingampais alertés coururent au secours de la capitale bretonne, contribuèrent grandement à sa délivrance.

À la mort de François II, il s’allia au roi de France Charles VIII et conquit une partie du domaine ducal. Il se prétendit et s’intitula alors duc de Bretagne, ce que Charles VIII dut lui interdire expressément.

Furieux, Rohan marcha sur Guingamp le 22 janvier 1488 pour la punir ; puis Brest et Concarneau vers le 15 février 1489. Le roi, avec l’appui du vicomte de Rohan, qui espérait toujours faire épouser à ses fils les princesses Anne et Isabeau (filles de François II), ne put que porter de nouveau la guerre en Bretagne.

Des mercenaires commandés par le prince d’Orange (Jean IV de Chalon-Arlay ou Jean de Chalon (1443-1502) ; franc-comtois au service de la Bretagne) entrèrent à Guingamp le 18 novembre 1487 pour la protéger et leur seule présence suffit à faire reculer le vicomte de Rohan. Guingamp n’en fut pas très heureuse car les mercenaires se conduisirent comme en pays conquis.

François II mourut le 9 septembre 1488.

Anne, fille de François II fut nommée régente. Le vicomte de Rohan, revint faire le siège de Guingamp et s’en empara le 22 janvier 1489. Les troupes françaises avaient occupé les hauteurs de Montbareil et de là avec leur artillerie eurent raison des murailles. Après plusieurs assauts des Français Guillaume de Boisboissel, commandant de la place de Guingamp, eut peur de ces troupes et après moultes tergiversations ouvrit la porte aux assaillants. La ville fut laissée aux bons plaisirs de la soldatesque ! Le renfort d’une colonne de secours anglaise arriva au début avril 1489 et les troupes françaises évacuèrent la place non sans faire d’exactions. Elles reviendront encore en septembre car leur solde étant irrégulièrement payée celles-ci se serviront sur le dos de la population guingampaise. Le siège de la ville y est décrit dans une gwerz du Barzhaz Breizh (chap. XXXV) de Théodore Hersart de la Villemarqué.

Le 6 décembre 1491, au château de Langeais, le roi de France Charles VIII épousa Anne de Bretagne.

En septembre 1505, la reine Anne fit un tour de Bretagne et s’arrêta à Guingamp où de nombreuses fêtes doublèrent les réceptions officielles. Elle fut logée chez un dénommé Yvon le Dantec. Qu’en est-il de la maison dite de la duchesse Anne (au N°6 de la rue Notre-Dame) ? Cette  maison, de style Renaissance, a été construite dans la seconde moitié du XVIe siècle (retour des Penthièvre à Guingamp) ainsi qu’il en a été rapporté par J. Le Monnier dans Guingamp, Avaugour et Penthièvre, publication posthume de 1923 (Clic ici). Elle n’a donc pas pu avoir reçu la duchesse Anne.

Lors de la guerre des religions (8 guerres entre 1562 et 1595), le gouverneur de Bretagne était le duc de Mercœur (beau-frère du roi de France Henri III). Sa femme n’était autre que Marie du Luxembourg, duchesse de Penthièvre, héritière des comtes de Penthièvre, éternels prétendants à la couronne ducale aux XIVe et XVe siècles. Mercœur se jeta dans la guerre de la Ligue (1588-1598, huitième et dernière des guerres de Religion, pour des motifs autant politiques que religieux) avec peut-être des velléités de se faire duc au nom des droits de sa femme.

L’armée royale commandée par le prince de Dombes entre en Bretagne et vient mettre le siège le 26 mai 1591 devant Guingamp, place forte détenue  par le duc de Mercœur.

Au début du XVIIe siècle, le duché de Penthièvre appartient à César de Vendôme, frère du roi de France Louis XIII. Il est gouverneur de Bretagne. En 1626, il participe au complot dirigé contre le cardinal de Richelieu, premier ministre de Louis XIII, et contre ce dernier, qui soutenait son ministre. Ce complot mené par Henri de Talleyrand-Périgord, comte de Chalais, visait à marier le frère du roi Gaston avec Mademoiselle de Montpensier, afin d’assurer une alliance à son frère et lui permettre de mettre fin à tout rapprochement entre l’héritier du trône et des puissances étrangères. Seul le comte de Chalais fut condamné à mort (pas moins de 29 coups de hache pour lui couper la tête !)

En 1626, Richelieu sonne le glas du château. Louis XIII, roi de France, ordonne à sa troupe d’araser le château au niveau des courtines. Les pierres seront utilisées à partir de 1668 pour construire les différents monastères (Ursulines, les Augustines, Montbareil par l’ordre des Dames de la Charité).

Armand-Charles de La Porte de la Meilleraye, grand maître de l’artillerie de France en 1646, nommé lieutenant général des armées en 1654. Il se maria avec Hortense de Mancini en 1661, nièce du cardinal Mazarin. Cette alliance arrangée lui apporta une dot conséquente à charge à lui de prendre le nom de Mazarin.

Armand-Charles de La Porte de la Meilleraye

Jamais l’union ne fût plus mal assortie. Belle, jeûne et légère, Hortense Mancini aimait le monde au-dessus de tout, et était entourée d’adorateurs. Armand, extrêmement laid, était d’un caractère austère et d’une dévotion outrée à ce point qu’il forçait les nourrices qui allaitaient ses enfants à suivre rigoureusement les jeûnes et abstinences de l’église afin d’habituer leurs nourrissons aux pratiques religieuses. Sa jeune femme, enjouée et amie du plaisir, ne pouvait s’accommoder d’un époux si bizarre ; aussi Hortense le quitta furtivement en 1668 et se retira à Londres, puis à Rome, sans jamais vouloir revenir près de son mari, malgré l’intervention du roi ; du reste sa conduite, soit à Londres, soit en Italie, est loin d’avoir été irréprochable. Cette séparation donna lieu à un procès célèbre devant le parlement de Paris, où le duc et la duchesse se déshonorèrent l’un l’autre par les écrits les plus ignominieux (1688). C’est à ce procès qu’il faut attribuer la décadence de la maison de la Meilleraye.

En 1666, il se rendit à Guingamp au manoir de Roudourou pendant quelques mois, dit-on, se remettre de  ses déboires conjugaux dans le calme et la solitude.

Le 20 juillet 1666, l’assemblée des nobles bourgeois de Guingamp, informée du départ prochain du duc de Mazarin décidait d’aller à Roudourou présenter ses respects à l’illustre visiteur et le supplier de conserver sa bienveillance à cette communauté et de l’honorer de ses ordres et de sa protection.

Charles d’Albert d’Ailly, duc de Chaulne

Le 20 mai 1675, dans une délibération de leur communauté de ville, les bourgeois de Guingamp signalent la pressante nécessité et le péril évident où l’on était dans le plus fort des troubles de la province [Note : Compte d’Olivier-François Allain, Sr. de Kercadou, maire, procureur-syndic et miseur (comptable chargé des comptes municipaux) des bourgeois de Guingamp, en 1675 et 1676, article 11ème].

Ils s’étaient pourtant hâtés de se conformer aux ordres expédiés de Rennes, le 3 mai, par M. de Chaulnes ; ils avaient mis sous les armes toute leur milice, établi des corps-de-garde et un service régulier, réparé de leur mieux les brèches de leurs murailles, fait des approvisionnements de poudre et de balles ; à cette date du 20 mai, ils possédaient dans leurs murs le marquis de la Coste, lieutenant-général du roi Louis XIV en Basse-Bretagne ; ils n’en étaient pas plus rassurés, d’autant que la présence de ce commandant semble indiquer qu’à ce moment le pays de Guingamp passait pour le principal foyer de l’agitation populaire, celui où l’on redoutait le plus une explosion. Le fermier de « Parc Bruc » en Plouisy avait pris part à cette insurrection des « Bonnets Rouges ». Elle éclata, en effet, dans cette ville même, durant la nuit du 24 au 25 mai 1675 ; mais les mesures des bourgeois étaient bien prises ; l’émeute fut réprimée sur-le-champ, et trois des plus séditieux restèrent prisonniers. Leur procès fut bientôt fait sur place, sans appel au Parlement, par le lieutenant du grand prévôt de Bretagne, qui les condamna à être pendus, et l’exécution suivit de si près que, dès le 6 juin, tous les frais étaient réglés et payés [Note : compte du Sr. de Kercadou, art. 24 ; et Ropartz, Histoire de Guingamp, 2ème édition, t. II, p. 125]. M. de la Coste resta encore à Guingamp une dizaine de jours après l’émeute pour assurer la pacification du pays, et croyant tout apaisé autant que faire se pouvait, il quitta cette ville, le mercredi 5 juin 1675 (Ropartz, Ibid., pp, 126-127), pour se rendre dans l’évêché de Cornouaille, où la fermentation était extrême, surtout vers Châteaulin.

Le duc de Chaulnes passa à Guingamp le 28 juillet 1671 venant de Brest et fut reçu avec tous les honneurs dus à son rang. Par contre lors de son passage le 7 octobre 1675 avec ses archers à cheval, l’accueil fut moins chaleureux !

Jacques II d’Angleterre (1633-1701)

En 1691, le roi Jacques II d’Angleterre  passa une nuit à Guingamp et plusieurs au château de Kerano en Grâces. Son catholicisme, sa politique pro-française et ses ambitions absolutistes le rendirent très impopulaire et il dut affronter une opposition de plus en plus radicale de la part de l’élite religieuse et aristocratique anglaise. Lorsque sa seconde épouse Marie de Modène donna naissance à un fils, Jacques François Stuart, laissant présager la mise en place d’une dynastie catholique, les nobles anglais demandèrent l’aide du protestant Guillaume III d’Orange, son neveu qui avait épousé sa fille Marie. Ce dernier débarqua en Grande-Bretagne à la tête d’une armée hollandaise et Jacques II fut contraint de se réfugier en France. Le Parlement considéra que cette fuite équivalait à une abdication et accorda la couronne à Guillaume et Marie qui régnèrent conjointement à partir de 1689 sous les noms de Guillaume III et de Marie II. Jacques tenta de récupérer son trône en débarquant en Irlande mais ses partisans furent défaits lors de la bataille de la Boyne en juillet 1690. Il vécut le reste de sa vie en France soutenu par son cousin le roi Louis XIV.

La Tour d’Auvergne (1743-1800)

Pendant la révolution, Théophile Malo Corret dit la Tour d’Auvergne (1743-1800) fit un séjour dans une maison de l’ouest de la place du Centre (anciennement Relai du Roy) où habitait son beau-frère Toussaint Limon de Tymeur, maire de Guingamp (il n’était élu que pour deux ans. Une première fois en 1784 puis il avait eu ses pouvoirs renouvelés le 1er mars 1786, puis le 6 février 1788.)

En guise de conclusion

Ville castrale idéalement positionnée commandant le passage nord de la Basse-Bretagne, capitale du plus puissant apanage du duché, celui de Guingamp-Penthièvre, rien ne semblait s’opposer à son développement. Ville prospère durant le Moyen Age, elle a su utiliser au mieux les ressources de son énergie naturelle, la rivière du Trieux en particulier, pour développer trois industries primordiales de cette période : les farines, le drap et le cuir. Sa bourgeoisie d’affaires et ses commerçants n’avaient alors rien à envier à celle des autres villes de Bretagne. Elle profitait de la dynamique des « Siècles d’or » apportée par « l’or blanc » qu’est la toile, entre le XIVe siècle le milieu du XVIIe siècle.

Parmi les causes de cette difficile entrée dans la modernité citons :

  • au premier rang, la saignée tragique opérée dans sa population par la grande peste de 1483 qui réduisit, par décès ou exil, sa population ; l’intensité du fléau fut telle qu’elle avait porté atteinte à la capacité de régénération économique de Guingamp, et surtout à la vitalité même de son tissu humain.
  • Le déclassement des défenses de Guingamp au début du XVIIe siècle marquait symboliquement la fin de son prestige médiéval.
  • Le développement urbain souriait maintenant aux villes maritimes ou fluviomaritimes.
  • Le développement de Guingamp se révèle aussi trop tributaire du destin des Penthièvre. La fidélité, parfois irrationnelle, de la ville à cette famille et seigneurie fut assurément un obstacle à son développement.
  • la crise du textile largement entamée au XVIIe siècle et la politique de Louis XIV. À partir de 1670, le Roi part en guerre contre la Hollande et celle-ci coûte très cher d’où une augmentation des taxes et la fermeture de débouchés économiques par la mer (Portugal, Espagne…), puis la révolte des bonnets rouges (1675). À partir de là, la Bretagne, en général, va vivre un « Age de fer » jusqu’en 1950, où grâce au CELIB (révolution verte) suivent les trente glorieuses dont Guingamp profitera.
  • Le manque d’esprit d’entreprise de la noblesse comme des bourgeois qui préféraient investir dans la terre et la pierre, et acquérir à fonds perdus des titres nobiliaires flatteurs mais improductifs.

La ville de Guingamp dans le cadre d’un regroupement des différents pays limitrophes (GPA : Guingamp Paimpol Agglomération)  parie aujourd’hui sur les industries de transformation agro-alimentaires, sur l’éducation et la matière grise, le tertiaire et le tourisme…

ROLLAND Jean Paul septembre 2018

Bibliographie :

  • Histoire de Guingamp par l’abbé Dobet.
  • Riches heures de Guingamp par Hervé le Goff.
  • Histoire de Bretagne par Jean Pierre le Mat.
  • Histoire de Guingamp Avaugour et Penthièvre par J Le Monnier.
  • L’art de vérifier les dates historiques (1819).

Liste des comtes de Penthièvre… : clic ici
Tableau des ducs de Bretagne : clic ici
Tableaux généalogiques simplifiés :

 

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