L’épidémie de choléra. 1832-1833
L’épidémie de choléra. 1832-1833
En attendant l’achèvement des travaux, la nécessité de ce nouvel hospice avait été cruellement prouvée par l’épidémie de choléra. Les épidémies ont sévi de tous temps, quel que soit le nom dont on les désigne : peste ou contagion, leur nature n’étant pas médicalement précisée. Elles trouvent un écho dans les archives de la ville : visite des maisons suspectes, soins aux malades, interdiction aux mendiants de pénétrer dans la ville, départ «préventif» des bourgeois aisés, etc.
Au XIXe siècle, elles sont hélas encore d’actualité : on en ignore encore les vraies causes et, par conséquent, les vrais remèdes et elles continuent à causer de nombreux décès.
L’épidémie de Guingamp dure officiellement du 10 septembre 1832 au 8 janvier 1833. A partir du 27 octobre, on tient la liste officielle des malades atteints du «choléra morbus».
Elle fait état de 95 cas déclarés mais il faut y ajouter :
- a) des décès antérieurs (entre le 11 septembre et le 27 octobre) :
– le 11/09, un cloutier sans domicile fixe, décédé à l’hôpital,
– le 11/09, un matelot décédé à l’hospice,
– le 25/10, une mendiante décédée à la prison,
– le 25/10, un militaire, décédé à l’hôpital,
– le 26/10, une religieuse hospitalière, décédée à l’hospice,
- b) du 27 octobre au 3 janvier, il se produit :
– 111 décès dont 59 officiellement dus au choléra.
Mais on s’aperçoit que plusieurs autres décès peuvent être considérés comme douteux au moins, en raison de parenté ou de voisinage avec les cas déclarés. Le maximum de l’épidémie se situe en décembre :
– 80 décès au total pour le mois,
– 75 cas de choléra déclarés sur lesquels il y eut 45 décès. Certaines journées voient se produire 4,5,6 ou 7 décès.
C’est une maladie foudroyante.
La grande majorité des décès se produit au domicile des malades. Cependant deux religieuses Augustines et trois infirmiers furent victimes de l’épidémie. Il y eût aussi quelques décès à la prison (celle-ci est encore rue St-Yves, dans l’ancien monastère des Carmélites).
Combien de guérisons ? (ou, plutôt, combien de «non-décès» ?)
Sur la liste officielle :
– 33 ne décèdent pas (sur 95 cas déclarés)
La maladie est, le plus souvent, foudroyante : parfois on note à peine 5 à 8 heures entre le début du mal et le décès; moins de 36 heures dans la moitié des cas. Certaines familles sont durement touchées : parents, enfants, voire grands-parents…
Dans quels quartiers ?
Les quartiers les plus touchés, par ordre décroissant, sont :
– Sainte-Croix et Montbareil (ils représentent 1/3 du total),
– Trotrieux, Ruello,
– St-Sauveur, rue de Tréguier,
– Saint-Michel,
– Porsanquen, rue de la Trinité.
Les professions les plus atteintes (par ordre décroissant) :
– ménagères (femmes d’artisans ou d’ouvriers),
– filandières,
– blanchisseuses, lingères,
– bouchers, bouchères,
– manoeuvres, journaliers,
– jardiniers, meuniers, tanneurs;
– 60 % des victimes sont des femmes (essentiellement de 20 à 60 ans)
La localisation maximale correspond aux faubourgs les plus pauvres : Montbareil (avec les bouchers qui abattent le bétail à domicile) et Sainte-Croix avec ses filandières et ses tisserands.
Les conditions de logement et d’hygiène y sont les plus mauvaises.
A noter aussi, de Sainte-Croix à Pont-Ezer, la proximité du Trieux vers lequel s’écoulent toutes les eaux de pluie recueillies dans les caniveaux à ciel ouvert et le rôle des lavoirs.