3. Annexes
Par M. Jean-Paul ROLLAND
Mez an Foar et la Peste en 1639
« Sur la remontrance qu’il est nécessaire de donner ordre à ce que la maladie contagieuse à présent en quelques maisons des faubourgs de cette ville ne gagne plus loin, a été enjoint au maire, attendue la nécessité présente et la célérité du fait de congédier et ce jour enjoint le fermier de Mézanfoar pour y loger en retirer les malades de contagion et pouvoir aux malades de vivres et autres choses nécessaires. Deux seront nommés par chaque semaine pour y vaquer concurrement avec le dit sieur Maire de la ville. Lesquels vivres seront payés par le fermier des octroys et le sieur maire et les semainiers tiendront bons mémoires ».
Maez an Foar et la Révolution
Communauté de la ville de Guingamp (propriétaire) de la métairie de « Maez an Foar » (logements, terre chaude labourable : 17 journaux dont 5 journaux sous verger, un pré 3 journaux). Fermier : Allain le Toullec, bail du 15 janvier 1789 pour 9ans, moyennant 515 livres, les fouages et les tailles.
- Estimation : 15 900 livres.
- Mise à prix : 38,625 livres
- Prix : 142 000 livres.
- Procès-verbal d’estimation du 15 prairial An III (3 juin 1795).
- Adjudicataire : Yves Toussaint Buhot-Kersers, négociant à Guingamp.
- Adjudication du 11 thermidor An III (29 juillet 1795) vente faite par l’administration du District de Guingamp.
Archives Départementales, série G, vente des biens nationaux.
Augustin Joseph Bobé de Moyneuse
Il est né à Paris le 20 floréal An III (8 mai 1795) rue de Clichy, section de la République. Il était le fils de Philippe Adrien Bobé de Moyneuse (lui né à Caen – 14) le 7 septembre 1757 et de Sévère Marie Olive de Kermel (née à Plouisy le 4 août 1766) dont le mariage avait eu lieu à Paris le 18 pluviôse An II (6 février 1794).
Augustin Joseph Bobé de Moyneuse n’appartenait pas à une famille bretonne, mais par sa mère, née de Kermel, par son grand-père maternel (né à Guingamp) par sa grand-mère maternelle, Sévère Françoise de Gouyon de Vaurouault (née à Plouisy) il était lié à notre région et particulièrement à la ville de Guingamp à laquelle il était profondément attaché comme en témoigne la donation de tous ses biens « sans aucune exception ni réservation.
Officier de la Garde Royale, Bobé de Moyneuse participa à diverses campagnes, y fut blessé et fait chevalier de la légion d’honneur et de divers ordres. En 1830, il quitta l’armée. Il mourut à Paris le 27 avril 1870, au 42 rue de l’Université dans le 7ème arrondissement, à l’âge de 74 ans, il était célibataire.
Par son testament rédigé le 9 mai 1863, il léguait tous ses biens à la ville de Guingamp pour y « fonder, construire, entretenir et doter un refuge pour la vieillesse, les pauvres, les malheureux et les incurables ». La fortune de Bobé de Moyneuse était représentée par des actions financières et des biens situés à Goudelin, Tréglamus, Louargat, Tonquédec.
Certaines volontés exprimées dans ce testament entrainèrent de sérieuses difficultés. La famille du donateur, la municipalité de Guingamp, les tribunaux, le conseil d’État s’en mêlèrent. Le Conseil d’État trancha les problèmes en accordant deux tiers de l’héritage à la ville de Guingamp, et un tiers à la famille. Ce leg était soumis à quelques obligations : souvenirs et rente viagères à un certain nombre d’amis ou membre de la famille du testeur et une rente perpétuelle de 40francs garantie à l’église de Saint Martin de Montmorillon, pour l’entretien de la tombe de son père et sa mère. Le 31 mars 1905, la fortune capitalisée du leg de Bobé de Moyneuse atteignait la somme de 508 755 francs. Le reliquat de cette somme, soit environ 260 000 francs, est demeuré placé en rentes d’État et le revenu est affecté à l’entretien des vieillards, des incurables et des hospitalisés…
Voir l’article qui lui a été consacré : clic
Georges Robert Le Fort (1875-1954), architecte
Architecte, peintre, graveur, professeur d’architecture, né à Paris, Guingampais d’adoption, il a marqué de son empreinte la Bretagne de la première moitié du XXe siècle, en particulier en proposant la construction du nouvel hôpital et qui sera retenu. C’est d’ailleurs un concours qui a décidé de sa carrière bretonne. A 25 ans, jeune architecte qui avait remporté tous les prix (à l’exception du grand Prix de Rome, une de ses grandes déceptions !), il débarquait à Guingamp pour construire l’hôpital civil et militaire. Une ville qu’il avait fréquentée tout enfant et où il a rencontré celle qu’il allait épouser. De son agence du 22, rue Notre-Dame à Guingamp qu’il n’a jamais quittée, il a essaimé dans toute la région. Créateur de la mutuelle des architectes français en 1931, il a été l’un des deux grands architectes de province qui savaient faire entendre leur voix à Paris. Y compris dans des conditions difficiles. Refusant d’interroger ses pairs sur leur degré d’aryenneté pour le gouvernement de Vichy, il a donné sa démission en 1941. Faisant un choix clair qui allait faire de lui, en 1944, une des figures de la Reconstruction.
Pendant un demi-siècle, il sera l’architecte municipal : en 1926-28, il se voit confier l’aménagement de la nouvelle École Supérieure de garçons sur l’emplacement de l’ancien hôpital. L’originalité fut de raccorder, une sorte de tour abritant l’escalier, l’ancien hôpital militaire (le seul conservé de l’ensemble du XIXe siècle) aux nouveaux bâtiments soigneusement rangés sur les côtés de la cour. Il coiffa cette tour d’un toit à quatre pans surmonté d’un clocheton rappelant à la fois celui qui dominait, depuis 1880, la Tour de l’horloge de la basilique Notre Dame de Bon Secours et celui dont il avait lui-même orné le bâtiment central du nouvel hôpital.
Voir l’article qui lui a été déjà consacré : clic ici
Plaque des noms des bienfaiteurs
Située à la base de l’escalier d’honneur du bâtiment central de l’ancien hôpital. C’est là où se déroula la cérémonie de l’inauguration le 24 octobre 1909. Malheureusement, les noms sont pratiquement illisibles, la dernière bienfaitrice est Mademoiselle Joséphine Le Gall en 1974. Cette plaque mériterait quelques égards par respect à ces personnes qui ont eu une grande bienveillance envers leurs concitoyens en leur léguant une partie de leur argent afin d’améliorer cet hôpital et ainsi les soulager de leurs souffrances sur cette terre ! Ne dit-on pas que : « Les morts ne sont vraiment morts que lorsque les vivants les ont oubliés » ?
Dès la déclaration de guerre, en août 1914, il fallut prévoir l’arrivée éventuelle de blessés et de malades militaires. Le nombre de lits des établissements de soins déjà existants, et occupés presque en totalité par des civils.
L’hôpital pendant la première mondiale
GUINGAMP : centre de chirurgie de 2ème ordre :
- HC (hôpital complémentaire) n° 85 : au sein de la caserne de la Tour-d’Auvergne, « hôpital dépôt de convalescents » disposait de 1 148 lits ;
- HC, n°13 : aménagé dans l’école primaire supérieure des filles, rue Yves-Riou, bénéficiait par ailleurs d’un hôpital auxiliaire, au collège Notre-Dame ;
- HC, n°16 : école Charles de Blois ;
- HC, n° 21 : 21 lits à l’école des filles sœurs de la croix de Montbareil du 26 août 1914 au 28 mars 1919 ;
- HDC, n° 19 : infirmerie du 48eme RI disposait d’une antenne de 19 lits à l’école des filles du château du 26 aout 1914 au 12 juin 1916, et, dans un hôtel particulier de la rue Saint-Nicolas, ainsi que de trois filiales établies à Louargat, Loc-Envel et Rostrenen.
Personnel soignant pendant la Première Guerre mondiale.
Les épidémies à travers les siècles
La Peste sévit à Guingamp a de nombreuses reprises :
- 1483, 1484, 1486, 1487, 1488.
- 1516, 1517, 1519, 1566.
- 1623, 1626, 1627,1629, 1630, 1631, 1635, 1638, 1639.
Les épidémies évidemment ne font pas de trêve :
- En 1741-42, la dysenterie,
- En 1748, c’est le typhus.
- En 1774, la variole fait périr 50 % des enfants.
L’épidémie de choléra dure officiellement du 10 septembre 1832 au 8 janvier 1833. À partir du 27 octobre, on tient la liste officielle des malades atteints du « choléra morbus ». Elle fait état de 95 cas déclarés, 33 ne décèdent pas ; pourtant la maladie est souvent foudroyante.
Au cours du XXe siècle, trois pandémies grippales sont survenues successivement.
- En 1918-1919, la pandémie dite de la « grippe espagnole » (Bien que les premiers cas connus soient apparus aux États-Unis, on lui a attribué le nom de « grippe espagnole » car l’Espagne — non impliquée dans la Première Guerre mondiale — fut le seul pays à publier librement les informations relatives à cette épidémie), due au virus A(H1N1) a touché le monde entier. Les estimations disponibles sur le site de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) indiquent qu’au moins 40 millions de personnes en seraient décédées. Les pandémies suivantes ont été beaucoup moins sévères :
- En 1957-58, la « grippe asiatique » liée au virus A (H2N2)
- En 1968-69, la « grippe de Hong-Kong » due au virus A(H3N2).
- En 2009, une nouvelle pandémie est survenue, due à un nouveau virus A(H1N1) pdm09 qui résultait d’une combinaison de différents virus grippaux d’origine aviaire, porcine et humaine.
La grippe, dernière grande maladie épidémique meurtrière (dans nos pays occidentaux), est la cause, certaines années, de quelques dizaines de milliers de décès supplémentaires qui, pour la plupart, ne sont d’ailleurs pas enregistrés sous la rubrique « grippe » mais gonflent certaines autres rubriques (affections respiratoires par exemple).
En 1969, encore la mort de millions d’individus semblait une fatalité alors qu’aujourd’hui elle nous paraît juste inacceptable. Nous attendons de la science qu’elle puisse nous protéger de toutes ces maladies, les vaincre voire peut être un jour vaincre la mort elle-même !
L’Histoire nous enseigne encore que nos exigences vis à vis de l’État ont beaucoup changé. Nous sommes désormais, et c’est le prix de l’État providence, dans une société qui « attend tout de l’État ». En 1969 personne n’attendait de M. Pompidou qu’il arrête la « grippe de Hong Kong » ou encore organise le confinement de la population pour sauver des vies. Aujourd’hui le moindre accident est nécessairement de la responsabilité d’une autorité publique et si l’on n’arrive pas à un résultat immédiat et satisfaisant, c’est forcément que les élites ont failli. En 1969 les médias étaient encore pour beaucoup sous le contrôle de l’État. Comme on ne pouvait pas arrêter la maladie on n’en parlait quasiment pas. Et la vie continuait tant bien que mal. À l’ère des chaînes d’info continue et des médias sociaux on ne parle plus que de la maladie, du traitement sanitaire, politique, économique.
La France, pays de Pasteur, est aussi celui où certains contestent l’intérêt des vaccins. Ceux qui accablaient d’insultes sur le Net ceux qui sont favorable aux vaccins insultent aujourd’hui parce que l’Institut Pasteur ne dispose pas encore de vaccins. Nous devons renouer avec la confiance dans le Savoir et regarder le passé, c’est parfois prendre le recul nécessaire qui permet de mieux construire l’avenir.
La dernière épidémie : le Coronavirus (germes entourés d’une capsule de protéines en forme de couronne, d’où leur nom) ou Covid 19 (acronyme anglais signifiant : Coronavirus Disease 2019).
Évidemment l’hôpital de Guingamp n’a pas échappé à cette pandémie (épidémie qui touche la population mondiale).
Le virus se propageait depuis quelque temps, mais le gouvernement français a décrété le confinement le mardi 17 mars à 12h. Cela consistait à une interdiction de se déplacer, obligation de rester chez soi et d’adopter les gestes barrières hygiéniques et de distanciation sociale. Les consignes applicables à partir de cette date sont les suivantes :
- Fermeture des écoles.
- Les seuls motifs de sortie étant d’aller travailler ou d’effectuer un déplacement professionnel,
- Faire ses courses, se déplacer pour raison de santé, pour raison d’urgence familiale, pour la garde d’enfant, pour une activité physique individuelle (à proximité du domicile) ou pour sortir un animal de compagnie, tout rassemblement étant interdit.
Les personnes se trouvant à l’extérieur de leur domicile doivent – sur réquisition des forces de l’ordre – présenter une attestation dérogatoire de déplacement (imprimée ou manuscrite) justifiant de la nécessité du déplacement. Fermeture temporaire des magasins et des entreprises « non essentiels pour la vie de la nation », et des lieux de sociabilité et de loisirs que sont les bars, restaurants, cafés, cinémas, casinos, et commerces de détail, à l’exception des pharmacies et des magasins d’alimentation.
Les pouvoirs publics mettront fin à ce confinement le 11 mai 2020 soit 55 jours !
L’hôpital a dû s’adapter selon les consignes venant du ministère de la santé et mise en application par le directeur Meur Samuel Froger et la présidente de la commission médicale doctoresse Hélène Guichaoua.
Pendant cette période de confinement plus de 800 dépistages de patients ont été réalisés. Une petite cinquantaine de patients ont été dépistés positives au Covid 19. Sur ce nombre, environ un tiers a été hospitalisé sur place, un tiers est rentré à son domicile et un tiers est allé à Saint-Brieuc.
Il a fallu organiser les différents services :
- Créer des circulations, des circuits d’hospitalisation Covid,
- Un sas aux urgences.
- Le service de pneumologie a été temporairement transféré en soins de suite et de réadaptation et remplacé par le service Covid.
- Les urgences ont été renforcées et réorganisées,
- La chirurgie a été mise en sommeil pour les opérations non urgentes,
- Renfort de trois médecins généralistes de la ville, qui ont donné une partie de leur temps,
- Mise en place d’un circuit de dépistage avec les laboratoires proches.
Attestation dérogatoire de déplacement.
Le personnel a dû subir une vraie charge Covid, avec des contraintes de masques en permanence, d’habillage et déshabillage, de stress de l’attente de la vague d’épidémie, avec des cellules de crise réunissant tous les jours la direction, les médecins et les cadres. Il a dû se réadapter au jour le jour.
Un constat a été fait : ce Covid 19 a soudé les équipes administrative et médicale, autour d’une même cause. Souvent, entre ces deux pans de l’hôpital, il y a des tensions, car on évoque des réductions de lits, de personnel… Là, elles devaient toutes se mettre autour de la table afin de s’organiser au mieux.
Chez les personnes qui avaient un suivi régulier (diabétiques, maladies chroniques…) beaucoup ont hésité à se rendre pour continuer le suivi de leur pathologie à l’hôpital de peur de contacter ce virus.
On peut dire qu’un hôpital la taille de celui de Guingamp est nécessaire lors d’une épidémie de cette ampleur, car il peut jouer la coopération inter hospitalière et la complémentarité avec Lannion ou Saint Brieuc.
Quant à la population de tous les âges et tous les horizons, elle a soutenu le personnel soignant de différentes manières : des dons, des croissants, des messages spontanés, des banderoles, des particuliers, des associations… Elle a montré une grande bienveillance avec les soignants. Le Covid 19 a mis en lumière le dévouement de tout le personnel de santé (médecins, infirmier.ère.s), aides-soignants (es)…) pompiers compris. Devons-nous seulement prouver notre reconnaissance aux soignants parce que nous sommes tous bouleversés par le Covid 19 ? Nous devons avoir pour eux une considération permanente. En commençant par classer ces métiers au niveau qu’ils méritent dans l’échelle sociale.
Il faut sûrement prendre en compte cette notion de « care » (mot anglais qui désigne l’action de ceux qui donnent avec leur cœur des soins, de l’attention aux autres, qui s’occupent de leurs semblables qui sont dans la tourmente). Ces personnes contribuent à une sorte d’élévation morale de la société en faisant le « sale boulot » ! Ce mot a une dimension philosophique, morale, une dimension du travail et aussi une dimension politique. En effet, si on veut valoriser l’attention à autrui (en particulier dans les EPAD), il faut valoriser ces professions. Cette notion « prendre soin » jusqu’à présent était un peu « ringarde », mais depuis cette pandémie il faut reconnaître nos dépendances, nos vulnérabilités ne sont pas réservées simplement à certains qui ont des accidents de parcours dans leur vie. La société doit pouvoir organiser nos interdépendances et valoriser tout ce travail qui consiste à prendre soin des autres ! Vœux pieux ?
Mais pour l’heure le virus est toujours là, le personnel soignant ne relâche pas sa vigilance, toutefois certaines personnes dans la population se montrent beaucoup moins rigoureuses (non-port du masque, pas de distanciation, refus des consignes…)
Néanmoins l’hôpital de Guingamp est et sera concerné par la nouvelle gouvernance qui découlera des accords du Ségur de la santé (consultation des acteurs du système de soin français qui s’est déroulée du 25 mai 2020 au 10 juillet 2020 ; L’origine du nom est l’adresse du ministère de la Santé, avenue de Ségur à Paris, par analogie avec le Grenelle du ministère du Travail de mai 68). Depuis trente ans, les gouvernements successifs s’appuyant sur l’absence d’unité des soignants dans leur ensemble ont imposé la vision néolibérale du management à l’hôpital avec pour objectif premier de réduire les coûts, constitués pour l’essentiel dans le service public hospitalier de la masse salariale, donc des emplois. Quelle place donneront ces nouveaux accords aux soignants dans la nouvelle gouvernance indispensable pour adapter le service public hospitalier aux enjeux à venir : vieillissement de la population, développement des maladies chroniques, obésité, diabète, troubles psychiques… ?
La maternité dans la tourmente
La chambre régionale des comptes met en avant le coût du service maternité. L’établissement est soumis à la concurrence du centre hospitalier de Saint-Brieuc et à celle du secteur privé. Les données tant médicales que financières ne plaident pas en faveur du maintien de la maternité et ont conduit les membres de la commission spécialisée de l’organisation des soins de Bretagne à rendre à la quasi-unanimité, le 17 mai 2018, un avis favorable au non-renouvellement de l’autorisation de la maternité. La fermeture de la maternité, structurellement déficitaire, permettrait à l’établissement hospitalier de se rapprocher sensiblement de l’équilibre financier.
Le nombre d’accouchements a baissé ces dernières années dans la maternité de Guingamp : 635 en 2015, 514 en 2016, 501 en 2017, 488 en 2019.
C’est en mai 2018 que tout a démarré. L’ARS annonce la fermeture de la maternité de Guingamp pour février 2019. La nouvelle jette un gros émoi dans la population guingampaise. Les élus se mobilisent. Un collectif de soutien est créé. Dès juillet 2018, les salariés de la maternité obtiennent un sursis de deux ans, peut-être grâce à… Jean-Marie Bigard. L’humoriste annonce un spectacle de soutien le 20 août 2018. C’est le député local Yannick Kerlogot qui joue les messagers.
Quoiqu’il en soit, le discours a du mal à passer du côté de la maternité. Car ce n’est qu’un sursis. La mobilisation et les actions se poursuivent. Des personnages de poids, comme M. Noël Le Graët, ancien maire de la ville et ex-président de l’EA Guingamp, s’investissent dans la lutte. Jusqu’à ce que la bonne nouvelle arrive : la maternité de Guingamp est sauvée et continuera son exercice après le 1er août 2020. Pour une durée encore indéterminée.
C’est la fin d’un long combat qui aura duré deux ans. La maternité, qui devait fermer en février 2019, puis fin juillet 2020, va finalement être maintenue.
La présidente du conseil de surveillance, Mme Annie le Houérou et le directeur du centre hospitalier de Guingamp Samuel Froger informent Mme Hélène Guichaoua, cheffe de service de la maternité, du renouvellement d’autorisation de gynécologie-obstétrique, à compter du 1er août 2020. L’autorisation est légalement accordée pour une durée de sept ans ; toutefois, l’ARS (M. Olivier de Cadeville, directeur général Agence Régionale de Santé) rappelle qu’elle sera revue avant cette échéance pour répondre à la réforme réglementaire des autorisations de périnatalité actuellement en préparation ».
Les Filles de la Charité
Instituées en 1633 par saint Vincent de Paul, et dont la formation fut confiée à Louise de Marillac, elles se consacrent au service des malades et au service corporel et spirituel des pauvres. Louise de Maurillac sera béatifiée en 1920 et canonisée en 1934 ; elle est la sainte patronne des œuvres sociales. Les Filles de la Charité sont numériquement le plus important dans l’Église catholique. À partir de 1920, elles furent remplacées peu à peu par des infirmières, par infirmiers psychiatriques et des aides-soignantes laïques.
Les Filles de la charité sont très discrètes. Leur effectif s’est rétrécit et leurs centres de vitalité se sont déplacés en Afrique, en Asie…
Après le concile de Trente (1545-1563) saint Vincent de Paul considère que la charité se fait au nom du Christ. Les Filles de la Charité retrouvent dans les pauvres, Jésus lui-même ; donc servir les pauvres, c’est servir Dieu, non pas d’une manière directe mais par des prières, des dévotions mais en venant en aide aux pauvres souffrants.
Au XIXe siècle, les Filles de la charité sont formées sur place, par observation et répétition des tâches. Souvent elles commencent comme institutrices et les plus douées vont aux soins, dans la vie des pauvres et les hôpitaux. Le summum de leur carrière c’est la pharmacie qui est un lieu plus complexe.
Ces religieuses sont des femmes au fort caractère malgré les apparences externes. Certaines dirigent des hôpitaux de 800 à 1 000 lits. Elles s’appellent toutes « sœur Marie… » Même la Supérieure (la responsable).
Émile Combes, en 1902, par une circulaire met sur pied le premier brevet d’infirmier avec pour objectif, comme dans l’enseignement, de chasser les religieuses et les remplacer par des infirmières laïques. Mais la République n’a pas les moyens d’assurer les coûts financiers pour remplacer l’ensemble des religieuses. Ainsi, après les avoir chassées, une partie de celles-ci passeront leur brevet.
Les infirmières d’aujourd’hui ne les comprennent plus. Lors de la grande grève de 1988, un slogan résonnait haut et fort : « les cornettes s’est fini » !!! Portée jusqu’en 1964, cornettes ou pas, rien n’a réussi à rendre les Filles de la charité impopulaires.
Professionnalisation ne veut pas dire laïcisation, car jusque dans les années 1970-80, les religieuses sont encore assez présentes dans les hôpitaux ; à Guingamp elles sont 21 à l’hôpital pour 280 laïcs, en 1969. Mais petit à petit, elles perdent du terrain non pas par incompétence mais par non-renouvellement des vocations.
Les Filles de la Charité se considèrent un corps à part entière et elles refusent d’être assimilées au nom d’une profession au personnel laïque avec lequel elles travaillent à diplôme égal.
Elles sont totalement disponibles et dévouées, le jour ou la nuit pour leurs malades. Et c’est cet héritage que le personnel laïc a capté.
Jean-Paul ROLLAND, août 2020
Hôpital aujourd’hui et en 1952
- Partie 1 : les anciens hôpitaux (jusqu’aux années 50)
- Partie 2 : l’évolution de l’hôpital et les autres structures médicales dans Guingamp (cliniques…)
Bibliographie
- Mes remerciements à Jean Louis Pinson qui comme d’habitude a mis à ma disposition ses coupures de journaux ; ainsi qu’à Charles Le Coq, archiviste de l’hôpital, pour sa collaboration.
- Les filles de la Charité et Le temps des cornettes, de Matthieu Brejon de Lavergnée chez Fayard.
- Émission du 28 septembre 2018 : « Les filles de la Charité » sur France Inter de Jean Lebrun.
- Les Amis du Patrimoine : numéro 21- Les hôpitaux de Guingamp.
- En France, l’Édit royal de Marly du 18 mars 1707, le premier grand texte de santé publique, réorganise les études et la pratique de la médecine, en ayant pour vocation d’« empêcher que des personnes sans titre et sans capacité ne (continuent) d’exercer la médecine sans y apporter souvent d’autre dispositions que l’Art criminel d’abuser de la crédulité des Peuples ».
- Photo de la manifestation de soutien à la maternité du 26 mai 2018 : J.-P. Colivet